« L’ECRITURE OU LA VIE », THÉÂTRE À L’ESTOMAC

lebruitduoff.com – 11 juillet 2023
AVIGNON OFF 23. « L’écriture ou la vie » D’après L’Écriture ou la vie de Jorge Semprún (1994) – Adaptation et mise en scène de Hiam Abbass et Jean-Baptiste Sastre au Théâtre des Halles – Off d’Avignon 2023 du 7 au 26 juillet à 11h – Relâche les jeudis 13 et 20 juillet.
Habitués d’Avignon, Hiam Abass et Jean-Baptiste Sastre reviennent cette année présenter un spectacle encore une fois fort et qui prend aux tripes.
D’après un texte de Jorge Semprún, les deux metteurs en scène, également interprètes, nous offrent ici une heure quinze d’une rare intensité. Difficile alors de sortir indemne de leur proposition. Revenu du camp de Buchenwald, Jorge Semprún pose la question de la possibilité de transmettre l’indicible. Comment évoquer l’impossible ? Comment cette réalité peut-elle survivre à ceux qui l’ont vécue tant la réalité semble impossible à décrire aux travers de mots.
Sur scène les quatre comédiens Hiam Abass, Jean-Baptiste Sastre, Geza Rohrig (acteur et poète hongrois) et Caroline Vicquenault, tentent avec succès une danse autour des maux de Jorge Semprún. Jean-Baptiste Sastre tantôt en lecteur de l’écrivain, tantôt masqué tel le fantôme d’un homme pourtant revenu en vie de l’enfer mais dont l’âme errerait toujours près des fours de Buchenwald, transperce le cœur du public retenant son souffle.
Sous les masques créés par Erhard Stiefel, seuls les yeux d’un émouvante profondeur livrent toute l’horreur vécue et le besoin de comprendre. Le comédien hongrois Geza Rohrig et Jean-Baptiste Sastre s’épaulent dans leur langue respective et, par le simple jeu d’acteur, permettent d’appréhender toute l’horreur décrite sur scène par Geza Rohrig. Alors que notre monde ne cesse d’être envahie par le mal, non pas un mal au sens religieux mais celui des hommes, le mal dans toute son humanité, comment ne pas oublier sa véritable intensité quand les principaux protagonistes disparaissent avec le temps ? Comment faire perdurer et rendre audible l’inaudible de ces personnes revenues des camps ? Telles sont les questions auxquelles tentent de réfléchir et de répondre Hiam Abbass et Jean-Baptiste Sastre en proposant ce puissant et magnifique moment de partage. A ne pas louper.
Pierre Salles

































Le propos est très fort et se suffit presqu’à lui même , mais la légère stylisation à la Tadeuz Kantor m’a gêné : pourquoi cette queue-de-pie et ces masques un peu datés qui affaiblissent le jeu d’acteur ?