« LA BELLE SCENE SAINT-DENIS » : QUE DE PEPITES !

AVIGNON OFF 2023. « La Belle Scène Saint Denis » – 11 – 15/07 2023 – Théâtre La Parenthèse.

Installée dans sa Parenthèse d’origine, La belle Scène Saint-Denis continue à donner à voir le meilleur de ce département, la Seine-Saint-Denis – souvent stigmatisé –  à savoir sa culture dans sa diversité.

Du 11 au 15 Juillet, Emmanuelle Jouan et toute l’équipe du Théâtre Louis Aragon de Tremblay en France proposent, le matin dès 10h00, trois programmes de danse, trois façons de voir le monde.

Je dis ça, je dis rien…

Avec « Órō », la toute jeune chorégraphe, multi-primée dans son domaine, Khoudia Touré, propose sous forme d’un trio, des extraits de sa récente création. Avec cette pièce, s’il en était encore besoin, elle montre et démontre l’emprise du Krump sur le Hip Hop en particulier et sur la danse en général, au point que, sa consœur Bintou Dembélé avec cette même danse a eu les honneurs du Festival et de son opéra avec un GROOVE qui prenait racine dans la musique baroque de Rameau, c’est dire si cette danse est prête pour tout.

Le duo initial de danseurs se complète durant la pièce par un troisième ; un danseur, venu de nulle part, sorte de double maléfique, tout de noir vêtu, d’un Roger babillard et philosophe à ses heures, donneur de leçon, persuadé de sa force par son ascendant sur son compère qui, lui plus jeune mais moins prolixes, veut avancer dans la vie, coute que coute : naïveté de la jeunesse ?

Khoudia Touré, habile éclate les dogmes de la représentation, s’affranchit du 4ème mur. La danse avec elle est partout et la tchach aussi… La physicalité des danseurs est portée par une musique au son afro qui permet de chalouper les corps… Mais qu’on ne s’y trompe pas, dès lors qu’il s’agit de rugir et de revendiquer, le Krump monte et les gestes se font plus vifs. On a hâte de voir la pièce entière quelque part dans le monde et m’est avis qu’on n’a pas fini d’entendre parler de Khoudia Touré.

Romuls & Rémus

Avec ce titre « Astride et Bastien », le duo, habitués de cette Parenthèse enchantée, Aicha M’Barek et Hafiz Dahou, se jouent de nous… On pense à un petit duo léger, sorte de pièce de Mozart avec rondeau et jolis portés… mais c’est mal les connaître… Ils ne lâchent rien. Avec ces deux jeunes danseurs virtuoses, ils font mieux, ils passent leur danse… C’est à dire qu’on voit l’œuvre de la transmission, pour ne pas que ce geste, à la fois fluide et fort, ne se perdent et c’est une réussite car tout y est. Intensité du geste, concentration et présence physique où, sous une chaleur de plomb dès Onze heure du matin, dans leurs sweets à capuches blanc et orange, les deux danseurs prennent le plateau…

Marche assurée, balancement du corps d’avant en arrière comme attirés, aimantés par le vide,  les longueurs de scène s’enchainent comme autant le kilomètres parcourus… D’une torsion ample du bassin, toujours dans une rotation précise, le mouvent de la tête, exécuté dans une lenteur inhabituelle, s’accompagne d’une flexion du pied qui permet de rétablir l’équilibre tellement tout semble instable…

Si la gestuelle de Aïcha M’Barek et Hafiz Dahou est virile et puissante, ils savent donner à voir des moments de douceur comme ce temps où l’un prend l’épaule de l’autre comme pour le ramener dans le droit chemin…

Un moment fort qui laisse présager d’une future pièce avec des danseurs qui sont en état de perpétuer la gestuelle de cette compagnie… c’est un plaisant espoir…

Danser la faille

Dans ce programme, il y a un intrus, finalement, mais c’est sans doute le moment le plus émouvant de cette matinée avec cette « conférence dansée », proposée par le danseur et chorégraphe Sylvère Lamothe et la comédienne Magali Saby… Dit comme ça, ça à l’air banal, mais lorsqu’on sait – et qu’on voit – que Magali Saby s’avance vers nous dans son fauteuil roulant et que Sylvère Lamothe, en Tshirt blanc, véritable armoire à glace face à cette frêle comédienne et – disons-le, c’est net – danseuse ! on sait qu’il peut – et qu’il va ! – se passer quelque chose… Et, entre le descriptif des actions que ces deux-là mènent dans des centres de soins, des lieux de rééducation… de la danse… une magnifique ode à la résilience, des portés magnifiques, une Piéta surgie dans le soulèvement de Magali par Sylvère qui prend délicatement le bras et la jambe de sa partenaire dans une douceur qui n’occulte pas la force du geste, pourtant… On sort de là avec une émotion qui vous traverse tant on est en capacité d’évaluer leurs efforts (après 10 opérations pour elle !), le temps pour arriver à cela, la force de ces deux à s’apprivoiser…

Dans ce brouhaha d’Avignon, c’est une pépite à ne pas manquer…

D’ailleurs, Ils présentent leur pièce « Tout se fracas » le 15 juillet à Contre-courant, sur l’Ile de la Barthelasse, allez-y, c’est si beau !

Emmanuel Serafini

« Órō » Khoudia Touré – La Belle scène Saint-Denis Avignon

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