AU GOLOVINE : « YAAI », L’HOMME SANS VISAGE

Lebruitduoff.com – 4 juillet 2024
AVIGNON OFF 24 : Yaay – Abdou N’Gom – Théâtre Golovine – 3 – 21/07/2024 12h15.
L’HOMME SANS VISAGE…
Après la fulgurance de son solo Entre Deux, le danseur et chorégraphe Abdou N’Ghom fait son grand retour à Avignon avec YAAY, un solo, sans doute le plus proche de ses origines africaines, interprété avec puissance et intériorité.
On entre et déjà on est dans l’ambiance… Un drap blanc sépare le plateau de jardin à cour. Des images de mer s’y reflètent avec une petite lucarne, typiquement l’esprit de ce chorégraphe généreux et ouvert sur le monde.
De magnifiques paysages suivent et tout d’un coup, fidèle à sa tradition de la dissimulation, après des bandelettes de plâtre pour recouvrir son visage blanc dans Entre deux, ici se sont une main, puis des bras sans tête qui apparaissent dans une béance du drap-écran et c’est ainsi que, depuis ce premier solo qui l’a révélé, Abdou N’gom joue avec le mystère de son visage comme pour habituer petit à petit le spectateur à sa couleur ébène…
Il surgit d’un coup de ces draps-robes, sculptural, puissant. Il emporte tout sur son passage. Abdo N’gom est bien là devant nous. Il va et vient sur scène avec d’amples mouvements telles les pales d’un moulin à vent.
Presque féminin dans sa danse qu’il interprète avec grâce, il se couvre du drap et on pense à Sankai Juku et ses longues robes prenant forme sur le plateau…
Dans la découpe d’une ligne il se lance dans une course immobile comme pour courir après quelque chose qui ne cesse de s’éloigner à mesure qu’il avance.
Magnifique palindrome Yaay permet à l’artiste de développer une poésie comme un slam qu’il se projette en lettres blanches sur son dos. Il y avoue ses histoires et ses doutes.
On retrouve dans cette pièce quelques fondements de la danse africaine mais aussi son hip-hop esquissé comme pour mieux le laisser partir. Les calebasses qui vont joncher le plateau servent à des images mi carapace mi bouclier. Dessinant un cercle de sable, il se retrouve dans cette sphère, ces ronds de battel où il a commencé et excellé. Abdou N’gom nous livre avec Yaay un moment fort et délicat, tout en finesse qu’il faut aller voir sans tarder.
Emmanuel Serafini
































