« LE MENTEUR », UNE FABLE DELICIEUSE

Lebruitduoff.com – 14 juillet 2024
AVIGNON OFF 24. « Le menteur », de Pierre Corneille, mise en scène Marion Bierry – au Théâtre du Girasole du 2 au 21 juillet 2024 (relâche les 8, 15 juillet) à 11h45 (durée 1h35).
Voilà un classique peu joué, à tort, tant il est drôle et fait entendre avec bonheur les vers de Corneille. L’ adaptation de Marion Bierry fait honneur à cette légèreté. Avec beaucoup de rythme, quelques chansons, un acteur formidable dans le rôle-titre et une belle distribution, ce Menteur remporte tous les suffrages. La salle est hilare, le temps passe à toute allure, et le spectacle est une vraie fête qui rend léger et heureux.
A peine débarqué de Poitiers, le gentilhomme Dorante s’éprend de la plus belle des deux jeunes femmes qu’il rencontre aux Tuileries. Pour se mettre en valeur, il n’hésite pas à s’inventer une vie trépidante, accumulant les mensonges qui finiront par lui jouer des tours…
En toile de fond, le bleu du ciel avec quelques nuages. Sur le plateau, un habile dispositif déploie à loisir des maisons aux fenêtres expressives, d’où les acteurs peuvent se montrer. Les comédiens sont en costume, l’ensemble est sobre et efficace. Quelle prestance ! Les vers de Corneille y sont pour beaucoup, l’interprétation d’Alexandre Bierry qui joue Dorante Le menteur aussi. Cette langue transporte littéralement à une autre époque tout en restant totalement intelligible.
Les mensonges de Dorante ne se font pas attendre. L’acteur est littéralement monté sur des ressorts, virevolte et débite avec une énergie débordante des énormités qui laissent son valet pantois. Plus l’artifice est grossier, plus il passe. L’excès semble rendre plus crédible encore. Guerre, réception, mariages inventés, tout y passe.
Le rythme emporte tout, le décor mobile permet d’enchainer les séquences sans temps mort. L’accélération se fait aussi par le chant, invité sur des airs connus (« dis quand reviendras-tu »), par touches soigneusement dosées.
Le suspense est tenu, l’arroseur sera bien arrosé sur son passage. Le caractère des femmes de la pièce est à souligner, elles ont du ressort et leur mot à dire, tandis que le valet tente en vain de sermonner son maître. Une très belle réussite, servie par une belle troupe bien menée.
Emmanuelle Picard
































