LE BRUIT DU OFF

Lebruitduoff.com – 17 juillet 2025

AVIGNON OFF 25. AMOR choisir sans renoncer – de Marjolaine Minot, Günther Baldauf et Guillaume Prin – au 11 Avignon à 17h55 – relâche les vendredis 11 et 18.

Il y a des spectacles qui s’affranchissent de la forme avec une facilité déconcertante, échappent aux classifications. La compagnie Marjolaine Minot continue de suivre ce chemin. Après La poésie de l’échec, voici AMOR choisir sans renoncer centré sur le couple et ses questionnements. La forme est originale, avec des décors symboliques efficaces, des séquences dansées, des petites voitures et des incursions philosophiques. Le propos se suit aisément, l’humour est omniprésent. Les « apports théoriques » peuvent surprendre, le questionnement du couple est là en tous cas, et résonnera plus ou moins avec chacun.

Au moment de partir en weekend, après quinze ans de vie commune, Lena et Esteban se posent des questions sur leur couple.

Il y a d’abord une DS miniaturisée, voiture qui se déplace tous phares allumés sur le plateau. Des formes géométriques aux faces rose et bleue mobiles permettent de créer les décors au fil de l’eau, se transforment en route, tunnel ou sommet. Les deux acteurs se lancent dans un échange du quotidien, que l’on peut entendre dans nombre de voitures. Faire un détour ou pas pour aller chercher l’essence moins cher ? Les paroles sont d’une banalité confondante et pourtant tellement justes. Le ton est donné. Commence alors une série d’aller-retours pour comprendre comment Lena et Esteban en sont arrivés là, et vers où ils partent.

Ce théâtre reste très physique : la manière dont les formes sont agencées, les situations provoquées (la séance de psy sur une forme à bascule inconfortable) et la séquence dansée par Lena donnent une dimension supplémentaire à la pièce, réveillent l’imagination.

Les séquences du quotidien alternent avec des incartades, une émission télé de philosophes, un échange d’anthologie entre Nietzsche et Platon. Si le match des deux grands philosophes fait rire et garde une certaine distance, le plateau télé est plus terre à terre, exposé pédagogique sur l’évolution historique de la structure du couple, dénonciation du patriarcat et ouverture sur d’autres formes. Ce côté didactique peut être pesant, et perdre en théâtralité. Il n’en reste pas moins que le questionnement est sincère, la forme originale et marquante. Une aventure en soi.

Emmanuelle Picard