AVIGNON OFF 2013 : « NES POUMON NOIR », A LA MANUFACTURE
LEBRUITDUOFF.COM / 9 juillet 2013
AVIGNON OFF 2013 : » Nés poumon noir » / La manufacture / du 7 au 27 juillet à 17h10 / Relâche le 17 juillet
Sortir des repères du concert, entrer dans les codes du théâtre, tout en conservant une écriture urbaine, voici le projet que présente « Nés poumon noir ». La présence scénique de Mochélan, appuyée par une narration vidéo conçue par le collectif Dirty Monitor et sur l’univers graphique de Juliette Delpech construit un objet scénique hors-genres. Un théâtre implacable, engagé, poétique et furieusement révolté.
La mise en scène de Jean-Michel den Eeyden transforme le jeu de mot proposé par le titre en jeu de scène au visuel immersif. La fumée, qui entâche les poumons de la ville, révèle sur scène des images qui s’inscrivent en arrière plan et concrétise la parole. Ce jeu d’échos entre ses différentes dimensions, visuelles, musicales et textuelles produit un univers à la fois suave et rude, tranchant et attachant.
La construction de cette forme scénique apte à traduire l’expérience d’un individu permet à Mochelan de questionner les rapports entre l’individu et son environnement. Le débit de parole cadencé de l’acteur retrace le parcourt initiatique d’un jeune homme cherchant sa place au cœur d’un lieu, Charleroi. La parole brute, empreinte de l’univers du rap, se pose sur des sons synthétisés et acoustiques.
Le phrasé calibré, habité, donne une force explosive à cette proposition. La représentation est néanmoins entâchée par les tentatives parasitaires de faire participer le public. Pour mieux coller aux attentes, se justifie l’auteur. Plus que la parodie qui se cache sans doute derrière ce geste, cela traduit une certaine velléité dans l’aboutissement du projet. Plus encore, cela casse l’identité de l’objet scénique construit, pour retomber dans l’univers de la performance humoristique mise en musique. Or le cinglant de la parole énoncée, ne peut s’inscrire dans cette boîte humoristique réductrice. Cette verve qui entretient un désir de subversion gagnerait à ne pas s’attarder trop longtemps dans les gradins, pour frapper encore plus juste, encore plus fort.
Quentin Margne.