AVIGNON OFF : ENTRETIEN AVEC BRUNO DESERT (ORCCA CHAMPAGNE ARDENNE)
LE BRUIT DU OFF / 11 juillet
Entrevue avec Bruno Désert, chargé de mission à l’ORCCA, Office Régional de Création en Champagne-Ardenne
Quelle est la politique de la région Champagne-Ardenne en matière de culture ?
Depuis trois ans, la région a reformulé sa politique pour essayer d’en renforcer l’impact et la lisibilité autour de cinq grands thèmes :
• l’aide aux équipes artistiques,
• la création / l’action culturelle / l’aide aux équipements pour le réseau structurant (les festivals, la formation et l’insertion professionnelles)
• la promotion (ex : Avignon) en aidant les équipes à se projeter au niveau national ou en veillant au rayonnement à l’étranger.
• l’action territoriale
• la présence en milieu rural (festivals, résidences)
Évidemment, je ne peux pas dire ce que sera la politique régionale en 2016 !
Quel est le projet de l’ORCCA à Avignon ?
En quelques mots, la présence de la Champagne-Ardenne à Avignon fut une initiative des compagnies. On a essayé de professionnaliser le projet et la Région s’est engagée à mettre des moyens financiers conséquents. Nous sommes la 18e région en termes de population mais la 3e en termes de choix et d’engagements financiers à Avignon. C’est une vraie volonté politique.
Sur les 30 à 35 compagnies candidates, nous en retenons 6 afin de permettre aux compagnies qui sont présentées de les aider à se projeter au niveau national ou international dans des conditions exceptionnelles par rapport à ce qui existe à Avignon. C’est une promotion auprès des professionnels dans le marché qu’est Avignon pour montrer qu’il y a des créateurs en Champagne-Ardenne.
Comment choisissez-vous les spectacles sélectionnés ?
Les spectacles sont choisis en février, on prend des créations récentes (depuis 18 mois maximum). Il y a un appel à candidature auprès des compagnies aidées par la Région. Elles doivent avoir un chargé de diffusion qui fera le travail de relance, donnée primordiale pour Avignon. On s’appuie sur un comité consultatif qui est composé de programmateurs de notre région. On ne sélectionnera pas forcement une compagnie qui a déjà eu une visibilité importante. On essaie de présenter des spectacles qui ne sont peut-être pas encore lancés parce que plus exigeants ou plus complexes. La présence sur une plate-forme nationale apparaît nécessaire mais sans élitisme. Je crois pouvoir dire que nos spectacles peuvent être vus par tout le monde.
Combien de personnes sont présentes en Avignon ?
On est entre 30 et 35 personnes : six compagnies, les administratifs et les élus. Puis il y a les lycéens de l’opération « Lycéens à Avignon » qui nous rejoignent.
Est-ce que vous faites un ratio entre les genres ?
On essaie, sans s’y obliger. Nous souhaitons avoir un spectacle de marionnettes et/ou de cirque puisque nous avons le CNAC (NDLR : Centre National des Arts du Cirque) et le Festival International de la Marionnette à Charleville ainsi que les deux écoles nationales supérieures. Le théâtre reste majoritaire dans notre programmation.
Quel sont vos budgets ?
Il y a plusieurs budgets : la Région attribue une subvention pour aider les compagnies à assurer une bonne présence. Le coût moyen d’Avignon pour une compagnie c’est 22 000€. La région prévoit 125 000€ pour les compagnies. La billetterie leur revient intégralement. La Région finance aussi les équipes techniques, ce qui coûte plus de 20 000 € et l’ORCCA dépense environ 30 000€ pour la logistique, 20 000€ pour la communication et 30 000€ pour les « Lycéens à Avignon ».
Techniquement, le parc matériel descend aussi avec les équipes quant au lieu, il est loué grâce à une convention pluriannuelle avec la ville d’Avignon. On est très attaché et conscient d’être un acteur, parmi beaucoup d’autre, qui doit contribuer à l’animation de la ville pendant le festival. On essaie aussi d’agrémenter les abords de la caserne et l’on travaille avec les commerçants voisins pour créer des partenariats.
Nos tarifs restent aussi assez modiques (15€ en tarif plein). Cela permet aussi au public de pouvoir accéder aux propositions.
A l’ORCCA, Nous avons une trentaine de salariés permanents et un budget global entre 1,5 et 2 millions d’€. Le financement est 100% région. C’est pour cela que nous sommes « office » et non « agence ». L’ORCCA va être intégrée au Conseil Régional en 2015.
Comment se porte le spectacle vivant en Champagne-Ardenne ?
Le spectacle vivant rencontre chez nous les difficultés qu’il rencontre partout en France : la baisse des financements publics de l’ensemble des collectivités, ce qui impacte les compagnies et les théâtres. Les compagnies peuvent parfois subir une double peine : baisse des crédits à la production et à la diffusion. Jusqu’à présent la Région a fait le choix d’éviter cette double peine en préservant les crédits à la création.
Devant les diminutions de crédits certains théâtres préfèrent parfois faire porter l’effort sur les coproductions ou les résidences plutôt que sur le nombre de spectacles (1).
De plus la CRESCA (Chambre Régionale de l’Économie Sociale en Champagne-Ardenne), propose des journées rencontres et formations. En 2013 il y a eu deux journées sur l’emploi administratif dans les compagnies avec les questions de mutualisation. Cette année, à l’automne, il y aura une journée de rencontre autour des relations entre compagnies et programmateurs, question délicate.
Combien y a-t-il d’artistes dans votre région ?
Environs trois cents intermittents sont présents avec de grandes disparités sur le territoire : la Marne concentre 40% des compagnies sur les quatre départements que compte la Région. Des territoires comme la Haute-Marne ou les Ardennes ont très peu de compagnies présentes.
(1) : les théâtres étant souvent financés principalement par les mairies, celles-ci sont très attentives aux nombres de représentations et aux nombres d’abonnés. Comme dans beaucoup d’endroit, la politique du chiffre écrase toute cohérence quant à la politique liée à la création artistique.
Propos recueillis par Bruno Paternot