AVIGNON OFF 2014 : FIN DE PARTIE !
LEBRUITDUOFF.COM / 27 juillet 2014
AVIGNON OFF 2014 : Fin de partie !
Le Off est mort, vive le Off ! Ce festival commençait cette année sous une chape de plomb, avec la menace de cet accord rejeté par nombre d’intermittents qui, au-delà de toute guerre de chapelle, voulaient marquer le coup. Mais soyons honnêtes ! Comment accepter de se saborder, de couper la seule branche de l’arbre sur laquelle on est assis ? Surtout quand on en a semé les graines et pris soin de ses feuillages. Comment demander à des créateurs ayant tout investi, de mettre à la poubelle parfois plusieurs années d’espoir et de travail ? Évidemment que la lutte est juste et souvent sincère ! Mais le jusqu’au-boutisme de certains ne doit pas faire oublier la liberté de choix d’action des autres. Il faut maintenant espérer qu’après les coups de gueule de part et d’autre, le moment d’un dialogue apaisant reviendra avec l’automne, et que les parties en présence n’attendront pas d’être au pied du mur de la Cour d’Honneur pour discuter enfin en toute intelligence…
Ce festival s’annonçait au mieux morose, au pire moribond, et nul doute qu’il l’a été. Il suffisait de se balader dans les rues d’Avignon pour s’apercevoir simplement de la grisaille environnante. Grise-mine des spectateurs qui, entre les annulations et le « non-buzz » dû au manque de public en début de festival, cherchaient encore et toujours à avoir des infos sur ce qu’il fallait ou pas louper. Mais aussi grisaille d’une création qui semble tourner en rond… Inutile de revenir ici sur la légion de propositions « tout public », terme manquant singulièrement d’ambition et qui qualifie les pièces dignes d’être au firmament d’une programmation « à la Le Lay » (lui qui voulait simplement vendre du temps libre de cerveau aux téléspectateurs)… Pas la peine non plus de revenir une fois encore sur ces théâtres avignonnais temporaires, qui n’ont de théâtre que le nom, ou sur ces « directeurs artistiques», qui pourraient tout aussi bien vendre des voitures ou des Tupperware, si cela leur rapportait plus…
Ne revenons pas non plus sur les pièces qui jouaient pour la énième fois dans ce festival. Ce sont parfois de bonnes productions, mais inutile de reproduire dans un festival de création ce qu’il nous est donné de voir chaque année à Noël ou pendant les vacances d’été à la télé. Comme des « de Funès », ces pièces tournent sur elles-mêmes, drainant un public comme lassé de devoir chercher la pépite dans le « Gérard » (petit nom donné par les professionnels au bottin du Off en hommage à Depardieu, toujours plus gros et de plus en plus incompréhensible). Puisqu’il n’y a rien de sûr, pourquoi ne pas aller voir ce succès perpétuel du festival 2005 ? Bonne nouvelle pour le tiroir-caisse et triste nouvelle pour la création française.
Et malgré tout, il y eut de belles choses pendant ce festival. Bien qu’attendant toujours la pièce qui vous fait vibrer et frissonner de plaisir, cette année nous a quelquefois réservé des créations qui, faute d’être extraordinaires ou innovantes étaient au moins sincères, dans le jeu comme dans la façon. Quelques grosses structures tirent très honorablement leur épingle du jeu, mais sans prendre trop de risques, tant mieux pour elles mais dommage pour nous. Quelques autres, prenant plus de risques, ont dangereusement tiré la langue durant ce festival, et d’autres encore, nous ayant habitués au fil des années à plus d’exigence, sont passées à côté.
Cette édition 2014 nous laisse donc comme un goût amer, le regret de ce manque flagrant de créativité, et l’envie d’une prise de conscience de tous, pour qu’enfin s’opère une mutation radicale de ce festival que l’on sent au bout d’un chemin. Soit le OFF repart de plus belle sur les chemins de la création, soit il bifurque sur ceux, définitifs, de la foire aux théâtres, proposant du prêt-à-penser comme plat bien indigeste de résistance, entre un verre de mauvais rosé et une salade passée à 20 euros l’assiette. Messieurs et mesdames du OFF, à vous de jouer…
Pierre Salles
J’ai été un des acteurs de ce off et que dire à part très bonne et très logique analyse… ce off est en effet dans une période charnière : ou il se réinvente ou il s’écroule sur lui même… stop à la sur location des habitations et STOP aux salles improbables aux programmations abyssales et au confort inexistant… vive la création et la folie !
Vous avez apparemment choisi de privilégier le verre à moitié vide plutôt que le verre à moitié plein.
Je comprends qu’il y ait des raisons à l’humeur maussade (les orages et la menace des grèves au début du festival) mais in fine en quoi ce millésime est-il plus ou moins bien réussi que le précédent ? En quoi les pièces de cette année étaient-elles moins innovantes que celles de l’année dernière ? Quand on n’est pas du microcosme avignonnais, comment comprendre vos phrases comme celles-ci : « quelques grosses structures tirent très honorablement leur épingle du jeu, mais sans prendre trop de risques » , « quelques autres, prenant plus de risques, ont dangereusement tiré la langue durant ce festival » ?
De qui parlez-vous ? A combien de compagnies ou théâtres ces commentaires se réfèrent-ils ?
Je suis un ‘gros’ spectateur durant l’année (comme on parle d’un gros lecteur) et pas en reste en terme de goût pour la créativité et l’innovation. J’ai vu cette année 8 spectacles dans le Off (donc moins que le spectateur moyen du Off, je n’y passe qu’un week-end). J’en avais vu 7 l’année dernière. Je n’ai pas constaté de différence qualitative. Je suis sélectif (grâce en partie à votre site) et dans ce que je vois, il y a du bon et du moins bon. De toute façon, ce que je vois représente moins de 0,7% des spectacles proposés donc mon opinion n’est pas représentative et n’est pas pertinente pour dresser un bilan. Mais quoiqu’il en soit, je reviens d’Avignon toujours enthousiaste : parmi les 1300 spectacles, je suis sûr de trouver des spectacles qui vont m’enchanter et la diversité des propositions est un des charmes du festival. Que parmi les 1300, il y en ait 100 excellents ou seulement 50 ou même 20, qu’importe ! De toute façon, on ne peut pas tout voir.
Pour faire un bilan il faudrait faire une analyse un peu plus rigoureuse et moins ‘cryptée’, qui ne soit pas simplement le reflet de vos humeurs et de vos opinions personnelles.