« LOIN DE LINDEN », GIUSEPPE LONOBILE, THEÂTRE DES DOMS
LEBRUITDUOFF.COM – 19 juillet 2015
« Loin de Linden » – mes : Guiseppe Lonobile – Théâtre des Doms – 20h00 – durée 1h25
Voilà encore une fois dans ce Off l’histoire d’une rencontre de classe sociale ou plutôt pour le coup d’une non rencontre. Eugénie est flamande et issue d’une famille pauvre, son père est garde-chasse du comte. Quand à Clairette c’est tout l’inverse, elle est wallonne et fille du Général de Witte. Le destin va unir ces familles par le mariage du petit-fils qui, bien longtemps après, convoque ses deux grands-mères pour comprendre pourquoi la rencontre n’a jamais eu lieu, pourquoi ces deux femmes n’ont jamais pu s’approcher l’une de l’autre…
C’est en 1979 que Veronika Mabardi enregistre l’histoire de ses grands-mères sur des bandes magnétiques, consciente qu’entendre leur histoire est le seul moyen de comprendre pourquoi celles-ci ne ce sont jamais parlé, pourquoi au fond d’elle-même elle exècre tant ces conflits culturels et ces classifications sociales. C’est au cours d’une résidence d’écrivain et de la rencontre avec le metteur en scène Giuseppe Lonobile que la pièce est créée.
La place du silence entre ces deux femmes s’impose immédiatement au metteur en scène qui joue le rôle du petit-fils. Il ne se met pas en scène en tant que « convoquant » des deux femmes mais comme leur petit-fils qui veut juste comprendre. Il tente alors d’enclencher la mécanique du dialogue entre ces deux femmes au travers de leur histoire respective.
Sur scène seul un petit parterre de carrelage noir et blanc, une table et deux chaises figurent la petite cuisine d’Eugénie, la flamande, pauvre mais heureuse de sa vie, entourée de ses enfants et qui est restée à Linden. Merveilleusement interprétée par Véronique Dumont, cette Eugénie est pleine de verve, une sorte de Villeret belge aux mimiques infinies qui peut déclencher le rire ou l’émotion dans le public en un clignement de cil. Tout dans son corps est troublant de justesse. Clairette, la fille de Général, est interprétée par une très juste Valérie Baucahu qui, bien qu’étant bien sûr d’avantage dans la retenue, joue avec autant de délicatesse ce rôle de bourgeoise belge ayant parcouru le monde.
Les deux femmes vont enfin se parler, ou plutôt parler d’elles, de leur vie, de leur histoire, sous les yeux d’un public conquis par un texte réellement touchant et issu de la souffrance d’une déchirure. Le metteur en scène et les interprètes ne tombent jamais dans le pathos mais dévoilent seulement par petites touches intimistes les dessous d’une rencontre impossible. Un très beau moment de théâtre aux Théâtre des Doms.
Pierre Salles
félicitations aux comédiennes et metteur en scène !