PHILIPPE CAUBERE : RECALE DEFINITIVEMENT AU « BAC 68 », ET PLUTÔT DEUX FOIS QU’UNE !
LEBRUITDUOFF.COM – 19 juillet 2015
« le bac 68 » – Phlippe Caubère – Théâtre des Carmes-André Benedetto les 5, 7, 11, 12, 14, 18, 19, 21, 25 et 26 juillet à 20h30
Philippe Caubère : recalé définitivement au bac 68, et plutôt deux fois qu’une !
Immense acteur au « pedigree » impressionnant (il paraît que l’homme n’aime pas trop les louanges…), ayant derrière lui une carrière que beaucoup et avec raison lui envierait, et nous ayant enthousiasmés encore récemment dans son interprétation d’Urgent Crier ! d’André Benedetto, Philippe Caubère, oserons-nous l’écrire tant le personnage semble réunir l’unanimité sur son nom, nous a ici et maintenant profondément déçus !
Cette version « courte », adaptation d’un épisode de L’Homme qui danse, version complète et originale de La Danse du Diable : Le Théâtre selon Ferdinand, propose d’introduire son immense saga en nous présentant les figures tutélaires que sont Ferdinand, le fils, et Claudine, la mère, l’un et l’autre n’étant que les avatars théâtraux de Philippe et sa mère en 68. Jusque-là tout va (à peu près) bien, Philippe Caubère nous ayant habitué à un style qui lui est propre où, en racontant son histoire, il traverse l’Histoire d’un siècle, et ce souvent non sans un certain intérêt (même si les histoires d’ego du personnage peuvent finir à la longue par provoquer une légère indigestion).
Comme il est stipulé dans la note d’intention accompagnant le présent spectacle, « son ambition première est de raconter aux jeunes gens d’aujourd’hui comment leurs parents (ou grands-parents…) ont passé le bac en cette année emblématique. Il aura comme intérêt ensuite de faire revivre en direct par les personnages clefs de La Danse du Diable, Claudine, la mère, et Ferdinand, le fils, la montée et l’arrivée au sein d’une banale famille française de ces évènements historiques qui ont bouleversé la société occidentale. » Et c’est là, où on ne suit plus… En effet, en guise d’éclairer les jeunes esprits sur cette période féconde en « événements » de l’Histoire, on assiste à un ramassis de clichés éculés qui – au lieu de transmettre le formidable enthousiasme généré par ce mouvement d’émancipation révolutionnaire parti des Etats Unis qui allait submerger la vieille France catholique, puritaine et conservatrice des années De Gaulle – vont mettre en exergue, de manière très potache pour ne pas dire beauf, des épiphénomènes sans grand intérêt si ce n’est celui de faire s’esclaffer à bon compte la salle sur l’ignorance crasse des jeunes de 17 ans en géographie. Plus réactionnaire et démago tu meurs.
Quant aux plaisanteries douteuses sur le système pileux d’Ariane Mnouckine, et autres gaudrioles sensées détendre les zygomatiques du public (l’épisode de l’obtention par la grand-mère du permis de conduire), elles relèvent directement de considérations « relevant » sinon de corps de garde ou de piliers de comptoir en goguette, du moins de fins de banquets de baptêmes. Rien de très excitant pour « éclairer » la jeunesse sur cette période. En guise de récit d’apprentissage à l’usage de notre belle jeunesse nous trouvons au mieux un concentré de blagounettes convenues.
Et lorsque la note d’intention rédigée par le même Philippe Caubère – à l’unisson du spectacle donné – prend les accents grandiloquents de va-t’en en guerre d’un tribun dénonçant avec véhémence l’inculture politique actuelle : « En ces temps de révisionnisme général, il me semble que rappeler ceci, sous une forme comique et populaire qui plus est, tient presque du devoir civique et républicain… ! Le but restant, bien sûr, d’abord et malgré tout, de faire rire petits et grands. », l’on rit franchement à notre tour… Mais pas pour les mêmes raisons que lui. Le comique populaire n’a rien à faire de la vulgarité qui méprise le peuple en pensant que seules les plaisanteries à ras du sol sont à sa portée.
Desproges, Devos, Bedos, Coluche (des générations pas si éloignées que cela de celle de Caubère) savaient naguère faire rire en élevant la conscience de chacun à un degré où elle n’était pas parvenue ; leur humour provoquait la réflexion et mettait intelligemment au travail chacun. Ils étaient caustiques, drôles à souhait et dérangeaient avec bonheur. Là, où Philippe Caubère ne fait que creuser des sillons mille fois rebattus et profiter de la rente de situation offerte à ceux qui flattent dans le sens du poil.
Urgent, Crier ! serait-on tenté de lui rappeler.
Philippe Caubère n’aime pas les compliments. Il va à coup sûr adorer ces lignes.
Yves Kafka
J’ai toute même l’impression que dans cet article vous vous offrez le plaisir de vous payer Caubère.
Il y a peut-être du vrai dans ce que vous écrivez mais tant de radicalité vient contredire ou tout au moins réellement affaiblir votre regard porté. Un peu de nuance (pas d’humour vous en avez) serait bienvenu et plus honnête.
La « nuance », tiède, sans engagement et politiquement correcte, n’est pas vraiment dans la tradition ni le goût de la maison… Désolée. Sinon, lisez « la Provence », ou tout autre titre supérieurement critique et bien informé….
Je ne vous parle pas du fond de votre engagement ni de l’esprit qui anime les choses. Si je lis vos critiques c’est justement parce que j’y retrouve totalement ces deux notions indispensables.
Je dis juste : que là j’ai l’impression que vous attaquez plus l’homme que le spectacle (cependant dans ce cas, les deux sont-ils dissociables…) et que cet amalgame dessert votre propos surement très juste. En gros je suis d’accord avec vous sur le fond mais je trouve que la forme un peu facile et donne l’impression d’être méchant pour être méchant… et là il ne s’agirait plus d’engagement mais d’une posture… Et me renvoyer à la lecture d’autre « critiques tièdes » comme seule réponse (un peu facile) pourrait confirmer ce sentiment… ça me rappelle Nolleau lorsqu’il est parfois critiqué à son tour…
La critique sans concessions oui ! mais sans panache… bof…