AVIGNON OFF : « LE NO-SHOW », LE THEÂTRE EST DANS LA MARDE…
LEBRUITDUOFF.COM – 19 juillet 2017
AVIGNON OFF – « Le NoShow » – Le Collectif Nous Sommes Ici et Théâtre Dubunker – Mise en scène Alexandre Fecteau – Au 11 Gilgamesh Belleville à 23h (2h05) – Relâche le 18
Décidément, les spectacles que je trouve intéressants dans ce festival sont ceux dont il faudrait ne rien dire si ce n’est « Il faut que tu y ailles, on en parle après ». Dans le cas du « NoShow » c’est encore une autre paire de manches. Je ne pourrais même pas vous dire si j’en ressors enchanté. Ici aucun problème de genre : nous sommes bien ici face à du théâtre. Les comédiens tentent le tout pour le tout pour séduire, un à un, afin d’être l’élu, le choix du public, et la frontière entre personnage et comédien est sans cesse piétinée.
Nous sommes bien devant du théâtre, et nous sommes même face à des comédiens qui nous parlent de théâtre. Ce spectacle part des sentiments et ressentiments d’acteurs et d’artistes qui ont décidé de fusionner deux compagnies pour les interroger ensemble. Ne nous y trompons pas, ce n’est pas un spectacle intello et le résultat est sans ambiguïté : divertissant. On y rit beaucoup, les deux heures et quelques (temps variable) passent rapidement, et on y est surpris souvent. Pourquoi vouloir faire ce métier ? Comment y parvenir ? Et une fois que l’on y est, comment le faire? Et dans quelles conditions? Nous savons tous que tout travail mérite salaire, mais quand on vous applaudit à la fin de votre service, lorsque votre but se situe au-delà de l’usinage d’un produit fini ? Devez-vous vous en contenter, avec la gratification comme salaire ? Et si les spectateurs décidaient eux-mêmes de leur prix d’entrée, devrait-on faire des coupes dans le spectacle?
Ces questions-là, les deux compagnies les posent aux spectateurs avant même l’entrée dans la salle. Et elles les posent ensuite au travers du dispositif dramaturgique avec l’aide de la vidéo en direct, des spectateurs et d’autres choses… Tout ce que je peux vous dire est que vous ne verrez pas le même spectacle que ceux qui l’ont vu la veille, ni que ceux qui le verront le lendemain, et que c’est vous spectateur qui en ferait une exception. La réserve que l’on pourrait émettre est que certains sortiront du spectacle avec une légère impression de vide. Il est en effet difficile de savoir si l’on a retenu autre chose que la forme. On se demande si les questions éthiques, artistiques, politiques, économiques et sociales sous-jacentes à l’écriture du texte sont encore présentes dans la tête des spectateurs à la sortie, tant la forme, les rebondissements et les interactions submergent l’ensemble. Le bouche à oreille positif impressionnant qui porte « Le NoShow » dans ce festival n’est probablement pas dû au fait que tout le monde trouve cela incroyable, mais plutôt au fait que, que vous aimiez ou pas, vous aurez du mal à ne pas y envoyer vos amis tant vous serez curieux de leurs réactions.
Baptiste Rol