AVIGNON 2017 : TOUT A UNE FIN, MÊME LES FESTIVALS !
LEBRUITDUOFF.COM – 30 juillet 2017
FIN DE FESTIVAL
Cette année aura été celle du Off puisque de l’avis quasi général, la programmation du Festival ne fera pas date alors que de belles propositions du Off ont laissé de très bons souvenirs à bon nombre de festivaliers.
Olivier Py a voulu pour cette année offrir un focus sur le continent africain mais c’est du côté du Japon que s’ouvrait cette 71ème édition avec le metteur en scène Satoshi Miyagi refroidissant la Cour d’Honneur avec son « Antigone » plutôt austère, tandis qu’Israël Galvan chauffait à blanc la moitié de la presse avec sa « Fiesta » libre. Cassiers, égal à lui-même depuis quelques années maintenant menait à bien son projet, tranquillement, dans le calme.
Notons aussi quelques grands noms comme le directeur de la biennale de théâtre de Venise faisant subir tourments et tortures aux festivaliers pendant près de 16 heures assis sur des sièges en plastique dignes d’une fête d’école de village. Les cris et le vide artistique teintés de snobisme auront eu raison de nombreux spectateurs, quelques courageux applaudiront ce spectacle conscients qu’eux aussi ont accompli une performance en restant là durant 16h. De grands moments aussi de l’avis général avec Tiago Rodrigues, maître du petit rien et du souffle. Mais passons… ne snobons pas quelques beaux moments de théâtre comme ce « Ibsen huis », que certains grincheux ont trouvé trop prévisiblement léché, et bien d’autres encore.
Force est de constater que l’organisation sans faille malgré une vigilance accrue et donc un surcroît de travail a encore suivi, pas de couacs si ce ne sont des retards quasi systématiques. Faute à la numérotation des places nous dit le directeur… Permettez-nous d’en douter, nombre de spectacles numérotés commencent à l’heure. Cherchez ailleurs le problème. Ceci étant, la numérotation est indéniablement un bon système qui évite aux spectateurs d’attendre une heure et demie au soleil pour espérer dénicher une bonne place.
Olivier Py nous dit qu’avec un peu plus de budget il verrait bien un Festival un peu plus long. Pour notre part nous préfèrerions des salles un plus belles et des lieux plus conviviaux quitte à diminuer le nombre de spectacles. Quiconque a foulé par exemple les espaces dédiés au public au gymnase du lycée Mistral a une idée précise de ce que le mot laideur et inconfort veut dire. A force de supprimer de beaux lieux, comme la carrière Boulbon que le Festival devrait absolument réinvestir, il ne nous restera que des salles sans âmes à l’accueil du public plus que limite qui s’acheminent vers le niveau de confort de mauvaises salles du Off. Mais ne soyons pas chagrin, de l’avis de tous ce festival nous a réservé quelques beaux moments qui resteront dans nos cœurs pour de longues années.
Pour ce Off, comme à notre habitude, soyons clair ! Quelques salles piliers du Off tirent largement leur épingle du Jeu. La Manufacture tout d’abord qui une fois encore a proposé une formidable sélection de spectacles et un accueil sans faille. Dommage que ce lieu ne dispose que d’une salle intramuros car sa programmation dont la qualité croît constamment manque cruellement de place. Jackpot aussi pour le nouveau « 11 », bien qu’en travaux et donc un peu en vrac au niveau de l’accueil du public, cette très prometteuse programmation en fait déjà un lieu qui pourrait devenir incontournable. Mais un seul festival ne parvient pas à créer la légende, patience… Le théâtre des Halles est toujours là avec sa programmation exigeante et efficace, seuls les fauteuils ou plutôt les bancs de la salle sous un chapiteau en surchauffe laissent à désirer dans ce beau lieu. La direction, toujours à l’écoute de son fidèle public, devrait peut être réfléchir et revoir l’installation ou le format de ce chapiteau. Le théâtre des Doms a eu de beaux sursauts par rapport aux années précédentes avec une scène belge toujours en recherche et innovante.
Le théâtre de l’Oulle semble lui aussi monter d’un cran avec son directeur, bien entouré, qui prend peu à peu ses marques et qui investit réellement son théâtre à Avignon en dehors du Festival. Le Petit Louvre a fait de beaux progrès depuis deux ans quand à sa programmation et son accueil avec du personnel qui semble maintenant mieux formé aux us et coutumes du festival.
Comment oublier le Chêne Noir, qui fête cette année ses 50 ans, avec une programmation tout aussi exigeante quoique plus classique. N’oublions pas que le Chêne Noir est en coréalisation sur tous ses spectacles et prend donc ainsi une grosse part de risque contrairement à d’autres qui n’en prennent aucun.
Impossible de vous parler de toutes les salles, certaines n’en valent pas la peine, certaines nous ont un peu déçus cette année mais quelques autres offrent aux spectateurs de merveilleux moments de théâtre. A vous de lire entre les lignes du Bruit du Off pour les dénicher et de ne pas hésiter à nous faire part de la découverte d’une pépite cachée par le brouillard de la multitude des propositions.
Cette année encore la progression des seuls en scène et autres bouffonneries semble se confirmer, on n’arrête pas le progrès diront certains… Sûrement les mêmes qui rêvent de nous vendre des spectacles tout prêts pour la grasse rigolade, juste entourés de quelques tranches de pub à chaque rire du public. Dommage aussi que le nombre de spectacles grossissant d’année en année pour un nombre de plateaux quasi constant oblige le système à nous présenter des spectacles de plus en plus courts. A ce rythme, d’ici dix ans, nous assisterons à des performances d’une demi-heure.
Espérons qu’AF&C qui a fait de réels progrès depuis deux ans arrive par petites touches à ranimer et garder le restant d’âme insufflée à la création de ce Off par André Benedetto. Quoiqu’il en soit soyons heureux que le Off d’Avignon ait retrouvé un climat apaisé qui peut laisser présager, on ne peut que l’espérer, du meilleur pour l’avenir. Le Bruit du Off a, comme à son habitude, suivi avec exigence l’ensemble des propositions que nous avions présélectionnées pour nos lecteurs. Nous avons cette année porté une attention particulière aux vidéos afin de vous apporter un maximum d’informations pertinentes sur les festivaliers et bien sûr sur les spectacles en offrant une parole libre aux metteurs en scène et comédiens.
A l’année prochaine !
Pierre Salles
Visuel : « F(l)ammes », qui était donné au Théâtre des Halles pour ce Off 2017.