« MARY’S A MINUIT », UN VALLETTI INTROSPECTIF
LEBRUITDUOFF.COM – 19 juillet 2018.
AVIGNON OFF : « Mary’s à minuit » de Serge Valletti – mise en scène : Dominique Jacquot – à la Caserne des pompiers – du 7 au 23 juillet à 20h45 – durée 1h10 – jours impairs – Relâche : 17 juillet
Serge valletti affectionne les grandes épopées et les introspections plus intimistes. Dans les deux cas il met toujours à l’honneur des losers, ces « mal à vivre » qui ne sont à leur place nulle part, pour peu qu’ils en aient une. Autant mettre en scène une épopée peut s’avérer compliqué, surtout quand il s’agit de devenir maître du monde ou nouveau messie, autant mettre en scène l’intimité d’un loser solitaire peut s’avérer hautement casse-gueule tant les textes de Serge Valletti frisent souvent l’absurde. Autant dire qu’il faut à la fois un grand comédien pour endosser le rôle et lui donner l’aura et le charisme
nécessaires à l’écoute et un metteur en scène assez charpenté pour ne pas plier sous le poids des circonvolutions de l’auteur.
Sur scène, Mary’s c’est cette femme seule que nous croisons souvent sans la voir, Mary’s c’est aussi cette parole toujours à la limite de la mythomanie, s’imaginant aussi bien un passé qu’un avenir. Mary’s est donc seule dans son appartement à attendre son amant McLaren, elle soliloque, s’invente une vie pour mieux nous décrire la nôtre.
Avec comme seuls accessoires quelques dessous, la comédienne Marie-Anne Jamaux interprète avec justesse et sensibilité cette femme touchante et cabossée vers laquelle chaque spectateur a envie de tendre la main tant chaque mouvement laisse à penser qu’elle va trébucher et sombrer. Le metteur en scène Dominique Jacquot use de très peu d’effets pour montrer cette femme décalée de tout et surtout d’elle-même.
Serge Valletti a toujours écrit sur ces êtres à la marge de la société, dont chacun aime à se moquer pour simplement ne pas regarder ses propres fêlures. Ce texte fait partie du recueil « six sols » qui ne fait pas partie, il faut le dire, des pièces les plus évidentes pour une première approche. Ce spectacle peut néanmoins convaincre les connaisseurs de l’auteur dans une proposition qui fonctionne sur scène et sans trahir le texte.
Pierre Salles