« PULVERISES », IL EST TENDRE D’ÊTRE HUMAIN !
LEBRUIDUOFF.COM – 25 juillet 2018.
AVIGNON OFF : « Pulvérisés » – d’Alexandra Badéa – Compagnie de l’Arcade – Vincent Dussart – Présence Pasteur 16h40
Belle idée que celle de reprendre ce texte primé en 2013 d’Alexandra Badéa qui, décidemment, sait écrire non seulement pour le théâtre, mais pour tout un chacun tant ce qu’elle décrit est notre quotidien, ou quasi…
Belle idée aussi d’en faire quelque chose, de forcer un peu le trait pour élever le débat et c’est ce que réussit très bien Vincent Dussart, inspiré par ce texte, qu’il place d’emblée dans un espace scénique atypique – surtout pour le OFF – fait de longs praticables posés en croix dans l’espace et qui permet de changer de lieux, de villes à tous moments et à tout instants… Les néons apportent une lumière crue, contemporaine qui donne tout de suite une modernité au propos comme à la mise en scène. Les comédiens sont biens. Ils sont caricaturaux à souhait, comme le commande le texte et passent du dominé au dominant dans les rapports intimes comme dans les rapports au travail avec dextérité, sans artifice, dans une fluidité qui sert le propos de l’auteur.
Car, de quoi s’agit-il dans ce Pulvérisés, outre la description à peine exagérée des inconvénients des voyages ? De la vie moderne, de notre propre vie décryptée, passée au scalpel et donnée à voir telle quelle sur la scène…. Et tout y passe, la vie trépidante des mères au foyer avec une triple vie à gérer, la fuite en avant dans le couple dans une société de la performance, des anglicismes, avec cette propension « à tendre vers l’excellence ».
Le rapport au travail, la mondialisation, sont aussi au cœur de cette pièce très crue qui dit les choses : « la caissière a un badge avec inscrit je souris pour vous depuis quand a-t-on remplacé les sourires par des écriteaux ! ». Tout est dit…
Une heure trépidante dans un monde qui ressemble au nôtre. Pas d’issue. Une société qui marche sur la tête, qui oblige les gens à faire des choses contre nature comme des africains à manger français pour mieux les servir dans des centres d’appels et de services en ligne… une société complètement déréglée, qui perd petit à petit toutes ses valeurs. A ne pas rater pour en prendre mieux conscience.
Emmanuel Serafini