« BATMAN CONTRE ROBESPIERRE », VOUS N’IMAGINEZ PAS TOUT CE QU’IL VOUS RESTE A PERDRE
LEBRUITDUOFF.COM – 26 juillet 2018.
AVIGNON OFF : BATMAN CONTRE ROBESPIERRE / mes Alexandre Markoff / Le Train Bleu / 19h10 / vu le Mardi 24.
La pièce commence par une scène absurde : une comédienne se confond en remerciements largement exagérés auprès du public. Deux comédiens la rejoignent sur le plateau, et tous trois surjouent le bonheur qu’ils ont à être sur scène et à partager avec nous ce bon moment. Puis ils annoncent vouloir choisir quelqu’un dans le public : ici pas de faux semblants, il est clairement dit que cette personne ne sera pas choisie au hasard (on retrouve là les codes des spectacles de rue, d’où vient initialement la pièce). Cet homme jouera le rôle de Jean-Claude Barbès, mais ce pourrait être n’importe qui : employé modèle, personnage tout ce qu’il y a de plus normé, avec une famille, un emploi stable, de l’argent de côté, une maison de banlieue, une résidence secondaire…
Mais tous ces biens, il va les perdre du jour au lendemain, sans raison apparente et avec le sentiment d’une injustice des plus totales. Va alors commencer une descente aux enfers qui mènera notre protagoniste littéralement en caleçon dans la rue, poursuivi par les habitants qui, au final, se retrouvent tous à courir sans même savoir pourquoi.
Malgré tous ces malheurs, Jean-Claude ne veut pas se laisser aller :« il faut rebondir » lui dit le maire, qui finit par se confondre avec la mascotte de la ville, Lapinou. Dans cette tentative de sauver le peu de dignité qu’il lui reste, Jean-Claude va se confronter à des personnages plus faussement altruistes les uns que les autres : une coach bien-être bornée, des communiquants voulant lancer une campagne de solidarité, qui n’hésitent pas à le rabaisser encore plus…
Dans cette comédie burlesque et grinçante, Alexandre Markoff met en scène une société inhumaine et individualiste, où l’échafaudage durement construit de nos biens dûment acquis (le protagoniste ne cesse de répéter qu’il a toujours fait les choses selon la loi) peut s’effondrer comme un château de cartes, et où la justice est à peu prés inexistante.
Le texte est diablement bien porté par des comédiens d’une énergie débordante, qui passent avec aisance d’un personnage à l’autre, déclenchant des salves de rire après salve dans la salle comble.
On ne sait pas forcément où l’auteur veut nous mener derrière l’évidente dénonciation de notre société moderne, mais ce qui est sûr, par contre, c’est que l’on passe un excellent moment !
Claire Burguiere