« LE PETIT THEÂTRE DU BOUT DU MONDE » : DOUCE POESIE APOCALYPTIQUE
lebruitduoff.com – 16 juillet 2021
AVIGNON OFF 2021. « Le petit théâtre du bout du monde – opus 1» – d’Ezéquiel Garcia Romeu – à La Manufacture à 9h40 (jours pairs, opus 2 les jours impairs)
« Le petit théâtre du bout du monde » est un spectacle de marionnettes autant qu’une installation artistique à admirer, une représentation où le marionnettiste ne se cache pas derrière ses accessoires, où il appelle le public par téléphone pour lui transmettre quelques indications scéniques. Quasiment sans parole, par la grâce de gestes et de figures qui prennent vie les unes après les autres, le petit théâtre du bout du monde s’impose et nous emmène dans une douce rêverie du monde d’après.
Au centre de la salle une grande boite aux murs transparents. Le public est invité à déambuler tout autour pendant le spectacle. A l’intérieur, les vestiges de notre civilisation s’accumulent : machine à écrire, télévision, gramophone… Ce bric à brac est un musée en soi. Comme Wall-E chez Pixar, un singe marionnette entreprend l’exploration de cet univers, à commencer par son marionnettiste. Il croise des personnages historiques, des figures imposantes et dans le monde d’en haut, des vestiges d’ailleurs. Quel réalisme effrayant dans ces silhouettes de bustes en mousse ! Les mécanismes qui actionnent objets et marionnettes sont très fins, le bruitage et les lumières précis, Le petit théâtre du bout du monde est une véritable prouesse technique.
Que s’est-il passé ? Il semble que le petit singe essaie d’envoyer un message à l’extérieur. Et puis une phrase éclaire l’ensemble. Que fait l’artiste face à l’Anthropocène qui se dessine et une réalité de plus en plus complexe difficile à appréhender ? Ne lui reste que la poésie pour aborder le réel. Les sacs plastiques qui entourent un des personnages en surface sont éloquents. Le petit monde du bout du monde raconte la nostalgie d’un monde qui vient après notre civilisation et rappelle d’autres exils passés Ezéquiel Garcia-Romeu et sa compagnie signent un spectacle tous publics, original, tout aussi poétique qu’ambitieux dans son geste.
Emmanuelle Picard
Photo Sonia Garcia