« FANTASIO », UNE FANTAISIE DEBORDANTE
lebruitduoff.com – 17 juillet 2022
AVIGNON OFF 2022. « Fantasio » – d’Alfred de Musset – mise en scène Emmanuel Besnault – au Théâtre de l’Oulle du 7 au 30 juillet 2022 à 13h05 (durée 1h25), relâche les 11,18 et 25 juillet.
Amis spectateurs, soyez prévenus : dans ce Fantasio, la langue d’Alfred de Musset côtoie les Doors et Nick Cave, le romantisme du XIXe se fraie un chemin jusqu’à nous par de la musique pop grâce à la compagnie de l’Eternel Eté. Ils sont cinq sur scène, maquillés et costumés, alternant entre les planches et les instruments de musique. Avec une énergie surhumaine sous la chaleur avignonnaise, ils donnent vie à la pièce romantique avec beaucoup d’entrain. Un mélange efficace qui en fait un bon divertissement.
Fantasio est revenu de tout. Persécuté par ses créanciers, il n’aspire plus à rien, et ne sait où se réfugier. Quand il apprend que le fou du roi est mort, il prend sa place et se retrouve auprès d’une princesse promise à un mariage catastrophique…
Le dispositif scénique est génial : une rampe d’accès pentue amène vers une scène de théâtre et laisse le champ libre à toutes les élucubrations. Les costumes sont « stylés » comme diraient les jeunes. Fantasio brille de mille feux dans son costume d’Arlequin, tandis que la princesse est une belle meringue. Les masques s’invitent avec bonheur pour multiplier les personnages. Le plan incliné de la rampe devient le lieu de toutes les interrogations et impulse une dynamique particulière à l’ensemble.
La langue d’Alfred de Musset s’invite avec bonheur, et la langueur de Fantasio est admirablement décrite. Textes et chansons alternent pour souligner les états d’âme des personnages, avec une assez bonne fluidité. Les acteurs sont aussi chanteurs et musiciens. Ils passent de la scène au micro ou à leur instrument sans hésitation, enchainent les répliques de Musset avec les paroles des Doors ou de PJ Harvey, qui contribuent au développement des sentiments.
Il est question de mélancolie, de devoir, d’orgueil et de liberté. Les états d’âmes de Fantasio sont touchants, comme le sacrifice de la princesse pour sa patrie, ou la liberté que revendique Fantasio à la fin. Le rythme du récit est plutôt bien maîtrisé, même si les chansons font durer le propos.
L’enthousiasme est cependant un peu victime de la chaleur écrasante d’Avignon. Les maquillages sont brillants d’efforts. Tout passe finalement à l’énergie, avec la volonté de faire tomber tous les murs. Une interprétation originale et divertissante.
Emmanuelle Picard