« LA MAUVAISE NUIT », LA POLICE TUE, COMME DIRAIT L’AUTRE
lebruitduoff.com – 19 juillet 2022
AVIGNON OFF 2022. « La mauvaise nuit » – m.e.s. : Julien Kossellek – au théâtre Le Train Bleu, à la Maïf à 15h55 du 8 au 27 juillet, relâche le 21 – durée 1h45 trajet navette inclus.
Tano vit seul avec son chien qu’il promène tous les jours au parc où il côtoie réfugiés, drogués et autres « paumés ». Tano est comme on dit « simplet », et doit prendre un traitement qui lui permet de vivre parmi « les autres ». Un soir, Tano croise une patrouille de police, qui lui demande de montrer ses papiers, Tano ne comprend pas, il connaît ces policiers pourtant, les quatre policiers vont le massacrer sur place.
C’est une histoire de violence gratuite sur une personne fragile et gentille qui est d’autant plus difficile à entendre, la violence dans le groupe, l’abus de pouvoir de l’uniforme, la mauvaise journée passée et le « besoin » de se défouler sur une personne « inutile » comme ils diront pour se défendre. Le récit est touchant et poignant, et se vit de chacun des parties, deux petites estrades où les différents protagonistes prennent place et racontent leur version, séparés par les vêtements de Tano posés à même le sol : son cadavre.
Laurent Joly, seul en scène, interprète avec fluidité tous les rôles, il passe du gentil aux méchants en un clin d’œil, les émotions montent quand on comprend que Tano ne sortira pas vivant et que le seul dans l’équipe qui aurait dû intervenir, finit par faire comme les autres et le rouer de coups.
« La mauvaise nuit » met en avant une violence collective, en alternant le récit et l’incarnation des personnages, afin de proposer au public une vision différente sur les perceptions agresseurs-agressé, ce qui amène également de la légèreté à un récit lourd en émotions.
La scénographie est ici minimaliste, tout repose sur le récit, la narration de Laurent Joly convaincante et absorbante suffit pour ne pas s’encombrer de superflu. La pièce se joue dans lieu très éclairé et tout blanc, seul petit bémol, car plongé dans l’obscurité, le ressenti est décuplé.
Béatrice Stopin