« ELISE – LA TRILOGIE », ELLE EST FORMIDABLE CETTE ELISE !
lebruitduoff.com – 20 juillet 2022
AVIGNON OFF 2022. « Élise – la trilogie » – Écriture, interprétation et m.e.s. : Élise Noiraud – au théâtre Le Transversal à 20h15 du 7 au 26 juillet, relâche le 20 – durée 4h30 entractes compris.
Chose remarquable pour un Off d’Avignon, Élise Noiraud présente la trilogie de ses spectacles à la suite : « La banane américaine », «Pour que tu m’aimes encore» et «Le champ des possibles ». Ces seule-en-scènes racontent sa jeunesse, de ses 9 ans à ses 19 ans, dans un récit d’auto-fiction d’une durée de 4h.
Le plateau est dénué d’accessoires inutiles, une simple chaise et une malle d’où la comédienne tire ses accessoires au besoin du récit, pour interpréter plus de trente personnages.
Dans le premier chapitre, Élise évoque sa jeune enfance, elle a 9 ans et vit sa vie de petite fille de la campagne où le moindre événement est important, comme la semaine sportive, la fête préparée pour la maîtresse, aller chez ses copines…. Dans le deuxième chapitre, Élise a grandi, adolescente, elle connaît ses premières booms, son premier amour et se passionne pour Céline Dion. Dans le dernier chapitre, Élise part étudier à Paris en faculté de lettres, où elle découvre l’indépendance et la vie parisienne.
Élise Noiraud, seule en scène, un chignon sur la tête et habillée tout de noir, se métamorphose pour incarner les trente personnages, son parlé et ses postures évoluent étonnement au gré des personnages, la professeure de sport masculine, de musique, les copines de sa mère…..au point de ne pas la reconnaître à la sortie du spectacle !
Quel plaisir de la voir la comédienne caricaturer les personnages en un éclair, ces gens qu’on a forcément croisés un jour et suscitent en nous flash-back et autres souvenirs, comme la mielleuse, celle qui fait semblant d’écouter, celle qui brasse du vent… Ce qui accentue toute la partie ironique de la pièce et du récit, Élise Noiraud a cet indéniable talent d’imitation et d’appropriation !
Au fil de la pièce, la comédienne nous parle de ses rapports avec sa mère, une mère qu’elle aime d’un amour réciproque même si la maman est toujours fatiguée et doit s’organiser tous les jours, débordée dans sa vie quotidienne, Élise pense que c’est normal. Mais petit à petit, la mère prend une place intrusive et directive dans sa vie, pour autant Élise l’excuse et accepte tout ce que sa mère lui impose ou lui dit, elle va la chercher à la boom à 21h en pyjama, plus aucun bruit à partir de 20h, elle lui impose une conversation mère-fille alors que ses copines l’attendent. La vie d’Élise est dirigée par sa mère, qui lui impose ses choix et s’appuie sur des motivations rationnelles pour que sa fille change d’avis. Jusqu’au jour où Élise comprend et analyse que sa mère est bien trop envahissante et prend une décision radicale.
Le spectacle aborde le sujet délicat de la transmission familiale, des rapports mère-fille souvent compliqués et de l’impact d’une mère qui vit par procuration au travers de sa fille. Plus le spectacle avance et plus l’on s’aperçoit que la relation avec sa mère, n’est plus drôle du tout, voire gênante, néfaste et toxique.
Assister à la trilogie d’Élise Noiraud, permet de dérouler le fil qui durant quatre heures, pointe l’emprise dont elle ne sait comment sortir. Élise Noiraud, est tout simplement formidable dans ce spectacle, pas une minute de relâchement de l’attention, le public attend toujours la suite et la cascade des personnages tous aussi touchants les uns que les autres. Sa vie parle à chacun, on peut s’identifier ou reconnaître des situations communes telles que simplement grandir et se construire dans son cercle familial. Cette auto-fiction est un pur moment de bonheur porté par une talentueuse comédienne.
Une épopée largement réussie où le juste milieu entre exagération et burlesque n’est jamais franchi. Un spectacle passionnant et entier. A découvrir sans plus attendre.
Béatrice Stopin