« SCENES DE VIOLENCES CONJUGALES », OU LES LIMITES DE L’IMPROVISATION
lebruitduoff.com – 20 juillet 2022
AVIGNON OFF 2022. « Scènes de violences conjugales » – Texte et mise en scène : Gérard Watkins – Au 11 du 7 au 29 juillet à 22h15 – Relâches les 12,19 et 26 Juillet – Durée 2h10.
C’est sur la base d’improvisations que l’auteur et metteur en scène Gérard Watkins a voulu travailler sur les violences faites aux femmes, qu’il s’agisse de violences physiques, morales ou institutionnelles. Ne voulant offrir une vision simpliste et manichéenne, Gérard Watkins et ses comédiens ont souhaité disséquer le mécanisme conduisant à la violence plutôt que simplement montrer la violence brute. Par petites touches, les comédiens interprètent tel ou tel couple au sein desquels la domination s’installe, tout d’abord psychologique, puis enfin physique.
Peu de décor si ce n’est un lit, en frontal d’une scène qu’on comprend être avant tout le huis clos de ces violences. Gérard Watkins décortique la vie de deux couples au destin tragique. Dans les deux cas c’est la femme qui, peu à peu, entre dans une forme de soumission à un homme devenant violent. Alternant les scènes de violence, parfois contenues, et celles d’un amour que l’on pourrait croire sincère et sain, le metteur en scène et ses comédiens plongent le public peu à peu dans l’effroi et, comme les protagonistes, dans une sorte de sidération.
Malgré le talent des comédiens, quoiqu’inégal, le perceptible manque de distance peut gêner et engendre un propos presque documentaire. Parti pris du metteur en scène, ce « naturalisme » manque souvent de distance et, bien que disséquant parfaitement les effets directs de la violence, ne permet pas forcément d’en analyser les causes profondes. Moins de démonstratif et plus d’introspection auraient surement aidé le public à y voir finalement plus clair. Telle est peut-être la limite d’un travail fait à partir d’improvisations. Un spectacle imparfait sur un sujet complexe mais qui a le mérite de poser les choses. À découvrir ne serait-ce que pour approfondir sa propre analyse du phénomène.
Pierre Salles