MARSIHO : SUARES PORTE MAGISTRALEMENT PAR PHILIPPE CAUBERE

http://www.lebruitduoff.com / 16 juillet 2012

AVIGNON OFF 2012 : Marsiho / d’après André Suares / ms et avec Philippe Caubère  / Théâtre des Carmes – 20h00

Philippe Caubère nous revient avec les textes poétiques tirés du roman « Marsiho » d’André Suarès (1868-1950), écrivain marseillais trop peu connu et auteur de très belles pages de la littérature française. Comment s’appeler Caubère, aimer autant Marseille, et ne pas, un jour, mettre en scène et offrir au public ces belles pages marseillaises ?

Entre amour et haine, Philippe Caubère, par un découpage intelligent, nous ouvre le cœur de Marseille. Et là… nous sommes bien loin des « pagnolades ». Suarès décrit un Marseille humide, chaud tel une femme, le sexe en lieu et place du vieux port, s’étirant vers le Pays Aixois et s’adossant quelque part sur la Sainte Victoire. Tout dans ses écrits est tourné vers la mer, vers ce mélange des peuples au centre d’une cité à l’identité férocement ancrée depuis des millénaires.

Mais Suarès crache aussi au visage de Marseille et des Marseillais le dédain évident qu’ils ont toujours éprouvé envers tous les artistes, et pas seulement à son endroit. On ressent, à chaque mot dit par Caubère, comme une sorte de répulsion et d’amour inconditionnel d’un enfant pour sa mère. A voir Philippe Caubère mettre en scène ce Marsiho, on ne peut s’empêcher d’établir un rapprochement entre ce Suarès qui n’aime pas Marseille et ce Caubère qui n’aime pas le Festival d’Avignon. C’est l’effet inconscient des grandes passions, un « je t’aime moi non plus ».

Caubère décrit par petits portraits tous les recoins de la ville, des plus sombres aux plus lumineux, toutes les âmes de cette cité pluri-millénaire. Ici et là, il nous semble reconnaître quelques scènes de la Trilogie, malin Pagnol d’avoir « piqué » ces quelques pépites. Nous retrouvons par la pensée les dessins de Dubout. Comment ne pas les voir dans cette irrésistible description des tramways d’époque, qui vaudrait à elle seule un court métrage ? Et les cagoles ! Les fameuses cagoles que Caubère met en scène de façon délicieusement dramatique sur une musique de Wagner. Il va nous parler de quelque chose d’horrible, d’un passage de la Peste ? Non ! Il nous parle des cagoles ! Et là encore, avec une infinie tendresse et un humour certain. Même pour ceux et celles qui ne connaissent pas la ville, Caubère leur offre le luxe d’un voyage poétique, une Marseille plus finement imagée dans une Provence entre Giono et Pagnol, sans détour, sans consensus, dans les entrailles de cette cité aimée et tant détestée.

Bien entendu, Caubère oblige, le spectacle est complet. Mais n’y allez pas «que pour Caubère», allez-y surtout pour découvrir un beau texte d’un grand auteur, dit de la plus belle des manières. Vous en sortirez en ayant une envie frénétique d’acheter et de lire le texte de Suarès (en vente d’ailleurs au Théâtre des Carmes) et surtout, un jour de flânerie, d’aller un jour re-rencontrer de façon plus poétique cette ville et son histoire, petite ou grande.

Pierre Salles

LABEL OFF : spectacle recommandé par lebruitduoff.com.

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