AVIGNON 2016 : « POMPIERS », OU LES AILES DU DESIR BRISEES

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LEBRUITDUOFF – 9 juillet 2016.

Pompiers – ms Serge Barbuscia – Théâtre du Balcon du 6 au 30 juillet à 17h, relâche les 11,18 et 25

« Il n’y a pas d’histoire d’amour, cette histoire-là ça ne peut pas marcher », aurait dit Lacan pour qui l’amour « c’est de donner ce qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas »… Et que n’a-t-elle pas, « Elle » (jouée superbement par Camille Carraz), cette jeune fille éperdument fragile que l’ingénuité désigne tout « naturellement » comme proie du désir des hommes qui ne voient en elle que l’objet sexuel susceptible de soulager les accès de leur testostérone ? Ce qui lui manque à elle, ce qu’elle ne peut donner, c’est l’amour dont on l’a privé ; enfant abandonnée et moquée par les adultes qui la trouvaient « limitée ». Et pourtant elle voudrait tellement l’offrir cet amour qui lui a fait dès son origine si cruellement défaut ; elle voudrait tant se réparer en réhabilitant dans sa vie actuelle la petite fille rejetée qu’elle a été.

Alors, lorsqu’un soir de bal, elle rencontre un beau pompier (incarné par un William Mesguich au visage angélique et au charme incandescent), elle s’enflamme instantanément comme une allumette qu’on craque contre une matière abrasive, et, prestige de l’uniforme attisant si besoin était encore plus son désir d’amour, elle va tomber dans ses bras en se donnant à lui sans réserve aucune. Le problème étant que ce dernier, s’il apprécie en connaisseur ses charmes, n’avait aucune autre intention que celui de satisfaire ses besoins « purement » physiologiques. Et, qui plus est, comme il est bon camarade, il l’a offerte en partage à ses potes pompiers.

Retour sur images… C’est dans ce « parloir » qui précède la salle d’audience où l’affaire va être jugée que Lui et Elle se retrouvent dans un huis clos sans échappatoire possible. Là débute l’affrontement où chacun d’eux va exprimer ce qu’il est.

Lui proteste avec une sincérité brutale et une mauvaise foi mêlées. Il n’en a jamais voulu de son amour, ce qui l’intéressait c’était le plaisir des rapports physiques, point barre ! Quant au « viol » collectif, elle était consentante, la preuve elle n’a jamais dit non !… Elle doit dire impérativement cela au juge !… La peur l’envahit, la culpabilité qui le gagne lui fait « découvrir » l’horreur de ses actes.

Elle lui dit avec une candeur touchante que les mots pour dire non lui ont tout simplement manqué, tant le trou d’amour de son enfance est comme une béance à jamais présente. Ce sont les mots de la psy qui recouvrent maintenant les siens et étayent la vérité qu’est la sienne. C’est fou comme la parole libérée peut dénouer les nœuds d’une histoire plombante. Ce qu’elle désire toujours c’est l’amour de cet homme, mais auparavant…

Lui dira : « Tu m’as donné du plaisir ». Elle dira : « Tu m’as donnée… C’est tout. ». La sobre mise en scène de Serge Barbuscia donne libre place au jeu aguerri des deux acteurs qui, entre caresses violentes et rejets en douceur, expriment les tourments du désir amoureux contenu dans les plis du texte écrit par Jean-Benoît Patricot. Combat sans fin mais non sans issue…

Yves Kafka

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